mercredi 25 janvier 2017

Dernières nouvelles de Majipoor - Robert Silverberg


Lorsque ce livre est rentré dans ma PàL il y a plus d’un an, je me suis demandé un moment si j’allais le lire un jour. Après tout c’est un recueil de nouvelles ayant trait à un univers dont je n’ai lu qu’un seul roman voilà bien des années… et je n’avais pas forcément envie d’y remettre le nez, encore moins en commençant par l’ultime opus.

Mais cette lecture prouve que parfois, cela vaut la peine de se forcer un peu, car non seulement j’ai beaucoup aimé cette lecture, mais en plus elle m’a donné envie de replonger dans le cycle tout entier, rien que ça ! Voyons donc comment la magie a opéré…


Dernières nouvelles de Majipoor est, comme son nom l’indique clairement, le dernier volume du cycle de Majipoor, vaste planet-opera en huit volumes mis en scène par Robert Silverberg à partir des années 80.

Majipoor, c’est une planète que les hommes ont jadis colonisé, bouleversant au passage les natifs, les Métamorphes (ou Piurivars). D’autres espèces vinrent ensuite s’installer sur la planète, et un pouvoir central finit par s’installer avec un Pontife, souverain en titre qui règne du fond de son labyrinthe, tandis que son successeur, le Coronal, se charge de mettre en œuvre sa politique.

Dans Majipoor, tout est immense. La planète elle-même est géante, à vous faire comparer notre bonne vieille terre à un mouchoir de poche. Quant à son histoire, elle court sur des millénaires : ceux d’avant l’arrivée des humains, ceux de la colonisation et enfin ceux du pouvoir pontifical. Là encore avec nos quelques millénaires d’histoire nous sommes des petits joueurs.

L’ensemble tient clairement de la science-fantasy : si l’on est bien sur une planète colonisée par l’espèce humaine (bien après notre époque donc), l’atmosphère est plutôt médiévale et la magie est présente. D’ailleurs lorsque j’ai lu Le château de Lord Valentin, premier volume du cyclé, je l’ai abordé comme une œuvre de fantasy (normal, c’est une quête initiatique !).

Voilà pour le décor (brièvement planté en début de recueil pour les nouveaux venus), parlons maintenant des nouvelles, au nombre de sept.

Le Bout du chemin, la première, nous présente un notable occupé à préparer la visite du Coronal. Elle permet d’office de prendre conscience de l’immensité de Majipoor, des relations difficiles entre ses différents habitants et des complots fréquents autour du pouvoir politique. C’est une excellente mise en bouche.

On enchaîne ensuite Le Livre des Changements, où un noble oisif décide de partir en voyage et se fait capturer par un brigand. Pour occuper sa captivité, il commence à écrire un poème qui racontera les hauts faits des héros des temps anciens. Le récit m'a captivé bien qu'il ne s'y passe finalement pas grand-chose. La mise en abîme autour de la fonction d’auteur est assez délicieuse.

La Tombe du Pontife Dvorn quant à elle met en scène un archéologue et un historien qui sont chargés d'aller fouiller et remettre en état la tombe du mythique Pontife Dvorn, avec tout ce que cela implique d'interrogations sur la vérité et sur la façon dont on écrit l'histoire, entre autres. Très intéressant pour ceux que cette question intéresse. Je soupçonne au passage le personnage de Hawud Zakayil d'être inspiré de l'archéologue (bien réel lui) Zahi Hawass.

Ce qui est chouette pour le lecteur lambda, c’est que ces trois nouvelles sont liées entre elles, bien qu’elles se déroulent à des époques différentes. Le protagoniste de la deuxième nouvelle écrit un poème qui met en scène un personnage de la première, et son œuvre tient lieu de source historique dans la troisième nouvelle. J’ignore si c’est volontaire mais c’est très sympathique d’avoir ainsi un fil rouge qui créé des liens.

Les trois nouvelles qui suivent portent plutôt sur la question de la magie. L'Apprenti en sorcellerie est une brève histoire… d'un apprenti en sorcellerie qui conjugue difficilement relations professionnels et amoureuses.

Heures sombres au Marché de minuit met de son côté en scène un marchand de magie qui apprend à ses dépens qu'on ne vend pas certaines potions à n’importe qui. Le résultat est plutôt drôle. Ces deux récits sont plus anecdotiques que les précédents, mais ils fourmillent de détails sur Majipoor.

De la manière de tisser des sorts à Sippulgar nous parle d’un homme parti chercher des informations sur la mort de son beau-frère. En chemin il va rencontrer plein de cultes religieux, ce qui va l’amener à s’interroger sur ce en quoi il croit. Après deux nouvelles où la magie est un fait, cette nouvelle vient curieusement interroger sur sa véracité. Là encore j’ignore si c’est volontaire, mais j’aime la façon dont ces nouvelles sont liées entre elles.

La dernière nouvelle, Le Septième Sanctuaire, est peut-être le texte le moins accessible pour les novices vu qu'on y retrouve Valentin, héros du tout premier roman du cycle. Mais l’auteur ne néglige pas le contexte (évoquant au passage toutes ses aventures), et même sans le connaître on apprécie cette histoire autour des Métamorphes qui offre un sympathique miroir à la première nouvelle.

Voilà pour ce descriptif peut-être un peu trop fourni d’un recueil fort sympathique. Je suis assez étonnée car bien que les textes aient pour la plupart été publiés d’abord dans des anthologies, ils s’assemblent ici parfaitement, et pas uniquement parce qu’ils se déroulent dans le même univers. Il y a un vrai travail de construction fort appréciable.

Dernières nouvelles de Majipoor est donc un excellent recueil qui se lit avec grand plaisir, qu’on connaisse ou non l’univers (pour une fois la 4ème de couverture ne ment pas à ce sujet). Robert Silverberg sait y faire pour nous conter de belles histoires avec suffisamment d’éléments de contexte pour rendre l’univers tangible, sans pour autant nous noyer sous les détails.

Une chouette lecture donc, qui m’a donné envie de replonger dans le cycle de Majipoor. Ca ne sera pas pour tout de suite vu que je n’ai pas les autres titres en stock, mais en attendant je me console avec le livre d’or de la SF consacré à l’auteur (alors qu’il n’avait pas écrit Majipoor, bonjour le décalage !).

D'autres avis : Cyrille, Elbakin, if is Dead, Yozone

CITRIQ

10 commentaires:

Arieste a dit…

J'ai beaucoup aimé ce recueil aussi, mais je suis une grosse fan de Majipoor donc c'était obligé. J'ai apprécié qu'il y ait plusieurs époques évoquées :)

Vert a dit…

@Arieste
C'est sympa cette balade à travers le temps, je serais curieuse de voir si on peut faire le lien avec les romans après...

lutin82 a dit…

Cela fait un moment que je me dit qu'il faut que je découvre cet univers de Silverberg. Tu ne fais que confirmer qu'il me faut m'y mettre.

shaya a dit…

Je ne connais pas du tout Majipoor mais ça fait enie ! Tu crois qu'il y a eu une mode de la science-fantasy ? J'ai l'impression que ça s'est pas mal fait à une période (Ann McCaffrey, MB Zimmer, lui...) et plus du tout maintenant à ma connaissance !

Ksidra a dit…

Encore un cycle dont je ne connais que le nom (et dont le premier tome au moins doit traîner quelque part dans la bibli). C'est finalement une bonne idée de commencer par les dernières nouvelles pour se faire une idée de l'univers :) Je note au cas où je tomberais dessus un jour !

Tigger Lilly a dit…

Ca a l'air sympa. Cela dit vu mon obsession pour lire les choses dans l'ordre, si j'y passe un jour ce sera en commençant par le premier tome :p

Lorhkan a dit…

C'est bien de savoir qu'on peut lire ce recueil sans connaître l'univers de Majipoor car il est sur ma PAL... mais je n'ai jamais lu de romans de ce cycle !
Du coup, je sais que je peux quand même le lire l'esprit tranquille, merci (mais j'ai aussi un côté Tigger Lilly en moi, et ce goût des choses faites dans l'ordre...). ;)

Vert a dit…

@lutin82
Le premier volume est très sympa. J'ai jamais lu la suite par contre parce que j'ai pas aimé la façon dont était construite le 2e tome (j'étais jeune et caractérielle) mais je vais sûrement retenter à l'occasion...

@Shaya
C'est pas impossible (quoique Pern est un peu plus vieux je crois, à vérifier). C'était le bon vieux temps (avant notre naissance xD)

@Ksidraconis
Ca peut être une bonne porte d'entrée en effet (c'est rare que ça fonctionne d'ailleurs)

@Tigger Lilly
Ca ne m'étonne même pas :)

@Lorhkan
Tu peux aussi lire le début du cycle (toute l'histoire de Valentin) et embrayer sur le recueil. Ou lire le recueil sauf la dernière nouvelle, continuer avec l'histoire de Valentin et revenir lire la dernière nouvelle. Tout est possible :D

Fánaríë a dit…

ça me donnerait presque envie de me jeter sur ce cycle.
à lire donc, mais j'ai quand même quelques livres sur le feu.

Vert a dit…

@Fánaríë
Fais gaffe à qu'ils ne prennent pas feu alors ;p