lundi 10 décembre 2012

Gabriel - Lisa Tuttle


En découvrant les nouvelles de Lisa Tuttle l’an dernier, je m’étais promise de continuer à explorer son œuvre. Un peu tardivement, je suis donc allée emprunter quelques titres disponibles à la bibliothèque dont un de ses rares romans traduits en français : Gabriel.
« Il s'appelait Gabriel Archer et avait été mon mari durant onze mois. Il était mort à vingt-trois ans, à quelques jours de mon dix-neuvième anniversaire. Dix ans plus tard jour pour jour, il était revenu me hanter. »
Voilà comment en quelques lignes à peine, dès le deuxième paragraphe de son livre, Lisa Tuttle nous introduit son histoire. Dinah est une jeune femme qui vit de petits boulots à Chicago, et qui n’a jamais vraiment reconstruit sa vie depuis la mort de son mari.

Alors qu’elle se réinstalle à la Nouvelle Orléans, qu'elle a quitté après le décès de Gabriel, pour commencer un nouveau travail, c’est comme si son mari venait la hanter, notamment via un jeune garçon, Ben, qui s’attache très vite (et bien trop) à elle.

Dès les premiers mots, j’ai retrouvé avec grand plaisir la plume de l’auteur, qui n’a pas son pareil pour mettre mal à l’aise en peu de mots. Et cette sensation de malaise subsiste tout au long de la lecture. Lisa Tuttle écrit des histoires fantastiques, mais c’est une horreur subtile qu’on trouve à l’intérieur.

Il n’y a pas de monstre et à peine un élément surnaturel (et encore, on peut les considérer comme tel ou comme le fruit de l’imagination des personnages). Tout est dans la psychologie des personnages, qui semblent tous par très nets dans leur tête (à quelques rares exceptions près).

Dinah semble n'avoir toujours pas fait le deuil de son mari, sacrée embûche dans toute tentative d'une nouvelle relation, surtout quand elle commence à s'accrocher à Ben. Le garçon n'est pas très clair non plus, surtout quand on se rend compte que sa vision des faits diffère parfois radicalement de celle de sa mère (il est difficile de savoir si c'est Ben qui déteste son beau-père et voit donc tout en noir, ou si le beau père est réellement mauvais). Et ne parlons pas de Sallie, la mère de Ben !

Cela contribue à poser une ambiance sacrément glauque (surtout pour l’étrange relation qui se développe entre Ben et Dinah), et c’est absolument fascinant à suivre, d’autant plus que le ton est incroyablement juste. Surtout dans les dialogues entre Dinah et Sallie, qui ont des retrouvailles plutôt dures, mais terriblement véridiques.

J'aime beaucoup la façon typiquement féminine de s'envoyer des piques qui font bien plus mal qu'un poing dans la figure, et leur capacité à finalement mettre de côté leur inimité parce que ce qu'elles ont partagé fait que paradoxalement qu'elles ont tout intérêt à se retrouver. 

Inutile de vous dire que j’ai été complètement happée par l’histoire, et que je me suis empressée de dévorer ce roman. Pour savoir comment ça finirait, certes, mais aussi pour en finir au plus vite avec la sensation de malaise (à la fois fascinante et révoltante) qui m’a accompagné durant toute la lecture.

Sur ce point, je crois que je privilégierais dorénavant les nouvelles de l'auteur, parce que porter cette histoire, plusieurs jours durant le temps de la finir, ce n'est pas une sinécure. Au moins avec les nouvelles, on se libère plus vite de leur atmosphère (quoique...).

En tout cas, cette lecture a confirmé tout le bien que je pensais de Lisa Tuttle, et je vais continuer à explorer son œuvre. Ca tombe bien, j'ai aussi récupéré un vieux recueil de ses nouvelles, Le nid.

CITRIQ

6 commentaires:

Tigger Lilly a dit…

Ça donne envie, très envie. Un jour je lirai tout ce qu'elle a écrit (et qui est sorti en français).

Vert a dit…

C'est un peu mon objectif aussi ^^

Lorhkan a dit…

Un jour il faudra bien que je lise du Lisa Tuttle...
Ce roman-ci a l'air intéressant en tout cas !

Vert a dit…

Il faut lire Lisa Tuttle, c'est affreusement glauque mais c'est bien ! Et surtout il faut lire Ainsi naissent les fantômes qui a tout pour plaire (un livre aussi beau à l'extérieur qu'à l'intérieur ^^)

Lune a dit…

Ah oui, moi j'ai Sur les ailes du cauchemar ! Je vois qu'elle est toujours aussi douée pour mettre son lecteur mal à l'aise, et qu'encore une fois son perso principal est une femme.

Vert a dit…

Sur ce point on n'est pas trop dépaysés en effet ^^