lundi 27 avril 2015

Le Cercle de Farthing - Jo Walton


L'an dernier, j'ai découvert Jo Walton grâce à Morwenna, le très touchant journal intime d'une adolescente dévoreuse de livres et fan de science-fiction. J'ai ensuite croisé à nouveau sa route dans l'anthologie 2014 des Utopiales, et j'ai une fois de plus été charmée. Il était donc assez logique que je m'intéresse à son nouveau (enfin pour les Français du moins) roman : Le Cercle de Farthing.

Premier tome d'une trilogie, Le Cercle de Farthing se déroule dans une Angleterre uchronique où la paix a été signée avec l'Allemagne en 1941 grâce un groupe de notables qui a réussi à évincer Churchill du pouvoir : c'est le Cercle de Farthing qui donne son titre au roman. L'Amérique ne s'est donc pas engagée dans la guerre, et Hitler a eu toute latitude pour se lancer à la conquête de l'URSS (il y est d'ailleurs encore quand le roman démarre, huit ans après).

Mais le roman ne se soucie à peine des conséquences géo-politiques de ce changement majeur à l'échelle mondiale. Au contraire, il se déroule pratiquement à huis-clos dans un manoir des Eversley, des membres du Cercle de Farthing. Lors d'une réception, l'un des membres les plus importants est assassiné lors d'une réception. Il est retrouvé poignardé dans sa chambre, une étoile jaune plantée dans sa poitrine.

Difficile de ne pas soupçonner David, le mari juif de la fille des Eversley. Mais pour l'inspecteur Carmichael, de Scotland Yard, tout cela est bien trop facile. Il va donc chercher à faire la lumière sur cette affaire.

Je me suis jetée dans Le Cercle de Farthing sans vraiment savoir à quoi m'attendre (mis à part une uchronie), j'ai donc été assez surprise de découvrir un roman policier, très prenant qui plus est. J'ai d'ailleurs consacré un dimanche après-midi à la lecture parce que je voulais avoir le fin de l'histoire !

Il faut dire que Jo Walton sait faire monter la tension en jouant sur une double narration qui alterne le récit à la première personne de Lucy, la fille des Everlsey dont le mari est soupçonné de meurtre, et celui à la troisième personne de l'inspecteur Carmichael. Et comme ils n'ont pas les mêmes informations, c'est assez savoureux de passer de l'un à l'autre et d’échafauder des hypothèses de son côté.

Forcément comparé à Morwenna, c'est un roman plus froid, qui joue moins la carte de la sensibilité (ce qui n'est pas un mal, par certains côtés Morwenna était presque trop facile à aimer), mais pourtant je suis très facilement rentrée dedans.

Cela tient beaucoup aux deux narrateurs, extrêmement vivants et humains. On sympathise très facilement avec eux, sans pour autant que ce soit des figures idéales. Je reprocherais juste un peu à Lucy de faire dans le lyrisme parfois, mais cela colle fort bien à son caractère.

Les personnages secondaires ne sont pas en reste, et qu'on les aime ou qu'on les déteste, on savoure les découvertes qu'on fait à leur sujet. Ce qui est assez rigolo c'est qu'on est dans le cadre d'une famille titrée, dans un manoir, avec des domestiques, bref on se croirait pratiquement dans la série Downton Abbey... à ceci près que les habitants de Downton Abbey font vraiment figure de bisounours à côté des Eversley et de leur entourage. Cette atmosphère assez proche a sans doute joué sur mon appréciation du livre.

Côté uchronie, elle se fait assez discrète par certains côtés, mais elle est très bien fichue par le fait qu'elle est pesante. On a parfois l'impression que les conséquences de cette « Paix dans l'honneur » sont minimes, et en même temps par bien des côtés cela m'a rappelé Le complot contre l'Amérique (mais en moins angoissant quand même).

Et l'intrigue policière ? Je pense que les habitués du genre pourraient trouver assez vite la clé du mystère, mais pour ma part j'ai pas poussé trop loin mon raisonnement et je me suis laissée emporter par l'intrigue, ce qui était vraiment très agréable. Je mettrais juste un bémol sur la fin qui m'a laissé un peu insatisfaite (elle a été pour moi à la fois facile ET frustrante), mais c'est rien de bien grave et c'est plus une question de ressenti personnel qu'un réel problème à mon avis.

Jo Walton a donc réussi une fois de plus à m'offrir une belle lecture. Si Le Cercle de Farthing me restera sans doute moins en tête que Morwenna, j'ai néanmoins adoré retrouvé la plume de l'auteur, et j'espère bien lire très vite ses autres écrits en français !

CITRIQ

10 commentaires:

BlackWolf a dit…

C'est vrai que c'est un roman complètement différent de Morwenna qui était beaucoup plus intimiste, mais comme toi j'ai passé un très bon moment de lecture avec ce policier chronique et j'ai hâte de découvrir la suite.

Vert a dit…

@BlackWolf
Elle sort d'ici la fin de l'année si je ne me plante pas.

Mariejuliet a dit…

c'est un étonnant mélange, mais parfaitement dosé il fonctionne en effet très bien.

Acr0 a dit…

Uchronie sur la géo-politique mais huis clos, l'impression que cela me laisse, c'est que l'uchronie s'avère finalement très légère (du moins pour moi, qui ne connais pas tous les tenants et aboutissants de la culture anglaise). Je ne suis pas grande amatrice de roman policier mais je me suis bien prise au jeu :)

Lorhkan a dit…

Très intéressant roman qui offre, sous couvert d'une intrigue policière assez classique, une uchronie qui, l'air de rien, pèse très lourd sur le climat social de cette Angleterre.
Jo Walton ne déçoit pas, et elle est très douée pour dépeindre des personnages humains et sensibles.

Vivement la suite !

Vert a dit…

@Mariejuliet
Tout à fait !

@Acr0
Moi aussi ^^.

Lorhkan
Oui j'aime beaucoup ses personnages, on s'entend tout de suite très bien avec eux.

aude.lagardet a dit…

Comme en général j'ai du mal à me motiver pour le genre policier, j'ai plutôt l'intention de me tourner vers les écrits plus anciens de l'auteur (si on lit en vo, il y a un large choix). J'ai d'ailleurs récemment découvert qu'elle avait une chronique récurrentes dans un blog (critiques de livres) : http://www.tor.com/Jo%20Walton

Vert a dit…

@Aude
Son dernier en date ("My real children" de mémoire) a l'air très très bien aussi

Julien le Naufragé a dit…

Tout comme toi, ce roman me reste moins en tête que "Morwenna". Cela dit, j'y ai passé un bon moment et je lirai probablement la suite avec plaisir.

Vert a dit…

@Julien
Vu comment ça se lit bien ça serait dommage de ne pas poursuivre de toute façon ^^